Nous continuons avec le Paysage, et
cette fois-ci nous allons travailler sur le principe du Hors-Cadre dans des
paysages photographiques… C’est quoi le hors-cadre ? C’est tout ce qui
pourrait se trouver hors du champ, tout ce que le photographe ne nous montre
pas…
La consigne d’écriture est la
suivante : je leur montre des photos de paysages et eux, ils devront décrire le hors-cadre de la photo,
en imaginant tout ce que le photographe ne montre pas, tout ce qui est en
dehors du cadre… C'est-à-dire : tout ce qu’on peut imaginer, tout ce qu’on
peut inventer… Par ce biais, la fiction – tout ce qui est produit par notre
imagination –, s’est invitée à notre atelier.
Le terrain pourrait déjà avoir été vendu aux enchères… Peut-être qu’ils voudront y construire un supermarché ou un centre de loisirs avec piscine et plein de toboggans…
M Corre, 3°A, Collège Henri IV
Ils ont vécu toute leur vie dans cette maison. Ils ont vécu des moments heureux. Ici. Dans cette maison. Un jour le gouvernement a décidé de détruire cette maison pour en construire une autre pour d’autres personnes. Pour eux, c’était comme si on leur enlevait tous leurs souvenirs. Un matin ils ont décidé de mourir ensemble dans la maison. Le drapeau à l’envers montre leur haine de cette Amérique qui leur a tout pris…
Bernie, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Cette maison a été isolée. Ses habitants sont
partis pour toujours, il y a quatre ans. Il n’y a plus personne dedans. Cela fait déjà quatre
ans. Seule et abandonnée dans ce trou perdu, elle se décompose petit à petit.
Elle se ternit doucement. Demain il n’y aura plus rien. Seule restera la silhouette
d’un arbre sans feuille qui n’exprime rien. On entendra le vent…
Sirandou, 3°D, Collège Victor Hugo
Il n’y a plus personne nulle part… Peut-être un
cheval, à gauche… Aucun bruit…
Adel, 3°A, Collège Henri IV
Encore des ruines derrière le photographe… Du
vent et du silence…
Célia, 3°1, Collège Pierre Brossolette
J’imagine qu’à gauche il y a le vide… Le rien… Et au loin, on entend des moteurs et une musique très calme…
Adel, 3°A, Collège Henri IV
Il pourrait y avoir un train rempli de passagers, qui passe en faisant un bruit assourdissant. Les gens ne s’entendraient plus parler durant quelques secondes… Ils pourraient froncer les sourcils, tant le bruit est insupportable…. Ils ne se rappelleraient pas qu’on est dimanche et que c’est jour de chasse… Ils ne penseraient pas à la forêt, à gauche… Ils n’imagineraient pas qu’ils puissent être les prochaines victimes de ces coups de feu répétés…
Manon, 3°A, Collège Henri IV
Il pourrait y avoir des turbines sous l’eau et une chaudière sous le sable.
M Nowack, 3°A, Collège Henri IV
Peut-être des requins sous l’eau. Non. Un seul. Un requin qui apparait tout d’un coup et la joie se transforme en peur… Et la mer bleu devient rouge…
Zlatan, 3°A, Collège Henri IV
Derrière, dans le dos du photographe, il y a un panneau où il y marqué « Sortie »…
Hamza, 3°D, Collège Victor Hugo
Une heure avant, la piscine à vagues était encore vide… On n’entendait que le silence… Tout était calme avant l’ouverture…
Romanos, 3°A, Collège Henri IV
En fin d’après-midi, les personnes commenceront lentement à partir. Petit à petit, la plage reviendra d’abord calme, puis se videra… On n’entendra plus que le va-et-vient des vagues… Et peut-être aussi le silence d’une journée achevée…
Alicia, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Dans un instant, un enfant qui ne sait pas nager va se jeter dans l’eau… Il va se débattre pour essayer de remonter à la surface… Il essayera, mais rien à faire : il se noiera… Les parents, inquiets, le chercheront partout…
Mathieu, 3°A, Collège Henri IV
Je pense qu’il y a eu un tremblement de terre… Ce jour où il faisait très beau… Les gens étaient dehors, heureux, et tout d’un coup, tout s’est effondré… Tout a été détruit…
Oumaima, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Il y a eu un bombardement de l’armée… Ce n’était pas la guerre… Ils étaient en train de faire un test… Au loin, on voit les avions militaires qui s’éloignent… Tout autour les gens approchent…
Morad, 3°D, Collège Victor Hugo
Ça pourrait être le décor d’un film en train d’être tourné. Un moment avant le tournage. Tout autour, des producteurs, des acteurs, des techniciens… Un peu plus loin, le réalisateur qui s’impatiente et qui discute avec les acteurs… A gauche, un groupe de passants entourent une célèbre actrice en train de tweeter... Un autre acteur renverse son café… Caméras, lumières, éclairages, des décors et des déchets pour la scène de la catastrophe… La caméra est prête…
Océane, 3°A, Collège Henri IV
On pourrait être dans le parking d’un hôpital psychiatrique. Une jeune fille perdue entre en scène. Au milieu du silence on entend ses pleurs…
Selin, 3°D, Collège Victor Hugo
J’imagine qu’au fond, il y a les dealers en train de vendre leur marchandise…
Maghnia, 3°A, Collège Henri IV
Quelque chose d’horrible s’est passé dans ce parking… Là, à mes pieds, des taches de sang… En effet, je suis morte… Quelqu’un vient de me tuer…
Célia, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Tout est fermé. Tout le monde est parti. Il ne reste que la lumière. Et cette flèche qui pointe vers nous et ne peut ni bouger ni changer de direction… A gauche – et un peu au loin – une personne a marché sur les morceaux de verres d’une bouteille brisée … Encore quelques heures pour que le lever du soleil redonne un peu de vie à ce parking.
Maryne, 3°A, Collège Henri IV
Nuit noire. Sans lune. Du sang quelque part. Silence pesant. Tout d’un coup, on entend les pas de quelqu’un. Bruits inquiétants. Cris. Sanglots. Après, le silence à nouveau. On n’entendra plus rien. Rien qu’une mouche, attirée par la lumière.
Niouma, 3°D, Collège Victor Hugo
D’un seul coup, le lampadaire s’éteindra. L’obscurité sera totale…
Fadi, 3°A, Collège Henri IV
A 8h30 du matin, le soleil va se lever et la première voiture arrivera… Ça sera un camion, transportant un manège qui sera installé sous le lampadaire…
Madina, 3°1, Collège Pierre Brossolette
C’est une expulsion de clandestins… Pourtant, ils travaillaient ici depuis 5 ans… Ils n’avaient pas de papiers… Ils étaient sans papiers… A présent, ils doivent rentrer chez eux… On entend le bruit de leurs valises qui roulent et leurs larmes qui coulent…
Anonyme, 3°D, Collège Victor Hugo
Il pourrait y avoir des turbines sous l’eau et une chaudière sous le sable.
M Nowack, 3°A, Collège Henri IV
Peut-être des requins sous l’eau. Non. Un seul. Un requin qui apparait tout d’un coup et la joie se transforme en peur… Et la mer bleu devient rouge…
Zlatan, 3°A, Collège Henri IV
Derrière, dans le dos du photographe, il y a un panneau où il y marqué « Sortie »…
Hamza, 3°D, Collège Victor Hugo
Une heure avant, la piscine à vagues était encore vide… On n’entendait que le silence… Tout était calme avant l’ouverture…
Romanos, 3°A, Collège Henri IV
En fin d’après-midi, les personnes commenceront lentement à partir. Petit à petit, la plage reviendra d’abord calme, puis se videra… On n’entendra plus que le va-et-vient des vagues… Et peut-être aussi le silence d’une journée achevée…
Alicia, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Dans un instant, un enfant qui ne sait pas nager va se jeter dans l’eau… Il va se débattre pour essayer de remonter à la surface… Il essayera, mais rien à faire : il se noiera… Les parents, inquiets, le chercheront partout…
Mathieu, 3°A, Collège Henri IV
Je pense qu’il y a eu un tremblement de terre… Ce jour où il faisait très beau… Les gens étaient dehors, heureux, et tout d’un coup, tout s’est effondré… Tout a été détruit…
Oumaima, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Il y a eu un bombardement de l’armée… Ce n’était pas la guerre… Ils étaient en train de faire un test… Au loin, on voit les avions militaires qui s’éloignent… Tout autour les gens approchent…
Morad, 3°D, Collège Victor Hugo
Ça pourrait être le décor d’un film en train d’être tourné. Un moment avant le tournage. Tout autour, des producteurs, des acteurs, des techniciens… Un peu plus loin, le réalisateur qui s’impatiente et qui discute avec les acteurs… A gauche, un groupe de passants entourent une célèbre actrice en train de tweeter... Un autre acteur renverse son café… Caméras, lumières, éclairages, des décors et des déchets pour la scène de la catastrophe… La caméra est prête…
Océane, 3°A, Collège Henri IV
On pourrait être dans le parking d’un hôpital psychiatrique. Une jeune fille perdue entre en scène. Au milieu du silence on entend ses pleurs…
Selin, 3°D, Collège Victor Hugo
J’imagine qu’au fond, il y a les dealers en train de vendre leur marchandise…
Maghnia, 3°A, Collège Henri IV
Quelque chose d’horrible s’est passé dans ce parking… Là, à mes pieds, des taches de sang… En effet, je suis morte… Quelqu’un vient de me tuer…
Célia, 3°1, Collège Pierre Brossolette
Tout est fermé. Tout le monde est parti. Il ne reste que la lumière. Et cette flèche qui pointe vers nous et ne peut ni bouger ni changer de direction… A gauche – et un peu au loin – une personne a marché sur les morceaux de verres d’une bouteille brisée … Encore quelques heures pour que le lever du soleil redonne un peu de vie à ce parking.
Maryne, 3°A, Collège Henri IV
Nuit noire. Sans lune. Du sang quelque part. Silence pesant. Tout d’un coup, on entend les pas de quelqu’un. Bruits inquiétants. Cris. Sanglots. Après, le silence à nouveau. On n’entendra plus rien. Rien qu’une mouche, attirée par la lumière.
Niouma, 3°D, Collège Victor Hugo
D’un seul coup, le lampadaire s’éteindra. L’obscurité sera totale…
Fadi, 3°A, Collège Henri IV
A 8h30 du matin, le soleil va se lever et la première voiture arrivera… Ça sera un camion, transportant un manège qui sera installé sous le lampadaire…
Madina, 3°1, Collège Pierre Brossolette
C’est une expulsion de clandestins… Pourtant, ils travaillaient ici depuis 5 ans… Ils n’avaient pas de papiers… Ils étaient sans papiers… A présent, ils doivent rentrer chez eux… On entend le bruit de leurs valises qui roulent et leurs larmes qui coulent…
Anonyme, 3°D, Collège Victor Hugo
GAGEURE
Par David Corre
Dans la salle voisine, des élèves travaillent par
groupe, certains sur les ordinateurs. Dans la cour, Jamel ramasse des feuilles.
Le self est nettoyé, on éteint les lumières. Au-dessus, d’autres élèves
travaillent, moins silencieusement, moins consciencieusement que nous. En salle
des profs, deux collègues papotent peut-être, ou corrigent des copies. À
l’administration, M. Schiano est au téléphone. Mounia classe des documents.
Mais tout cela est loin de nous, loin de la classe. Nous n’y pensons pas :
nous ne le voyons pas. Nous ne saurons rien non plus de cette petite vieille
qui passe devant le collège avec son chien blanc ridicule dans son manteau
écossais. Ni de ce couple de jeunes gens qui devrait être en classe mais qui a
préféré rester dans les rues à se promener, main dans la main. Nous n’en
saurons rien, et pour cause, puisque tout cela s’est peut-être passé, mais en
dehors de la classe. Et pour le moment, pendant deux courtes heures, nous
travaillons, concentrés…Ma feuille sur ma table, et mon stylo qui court sur sa surface blanche. À côté, mon collègue d’E.P.S., qui écrit, lui aussi, sur sa feuille. Et devant moi, des rangées d’élèves, appliqués comme rarement, silencieux comme jamais, et qui noircissent du papier. Et Sergio, devant le tableau, ou entre les rangs, qui papillonne, qui volète d’un écrit à l’autre, fasciné, surpris, curieux – enchanté.
Nous sommes si concentrés que nous pensons à peine à ceux qui nous entourent. Et encore moins à tout ce qui se déroule, là-bas, dehors.
***
Pour cette séance, Sergio a choisi une dizaine de photographies de paysages, avec ou sans personnages, tous plus étranges ou intrigants les uns que les autres. Il nous invite alors à nous concentrer sur tout ce qui peut se trouver dans l’entourage immédiat des photos projetées, mais que l’on ne voit pas. C’est le hors-cadre (ou le hors-champ). C’est notre nouveau point de départ. Un point de départ imaginaire – j’allais écrire « inexistant » ! Sergio en fera un pont, de cette inexistence à laquelle nous allons donner forme, un pont qui enjambera tout l’espace entre les paysages montrés, photographiés, et l’univers contenu dans notre imagination.
Car c’est bien d’imagination qu’il s’agit. Ces quelques photos choisies par Sergio sont comme des pontons, comme des tarmacs pour laisser s’envoler nos récits. Sergio nous fait, sans y prendre garde, créer une situation, des personnages et lâcher l’écrivain en nous.
***
Quelle surprise pour moi ! J’ai contemplé,
effaré, ma vingtaine d’élèves ne plus dire un mot, pendant quarante minutes, et
écrire, ou parfois lever le nez en mâchouillant son stylo, inspirés, exigeants.
Sergio a transformé mes élèves en conteurs ! Comme par magie. Et au moment de la lecture aux autres, mon impression se confirme : c’est bien en conteurs, qu’ils ont écrit – loin, très loin de leurs habituelles rédactions scolaires. Ils ont cherché une histoire qui tient, un récit qui accroche le lecteur, qui le mette en haleine. J’ai été surpris, souvent, par leurs idées, captivé, convaincu. J’ai même été jaloux, parfois, devant l’incroyable imagination dont ils ont fait preuve. Certains ont eu un talent fou, se rapprochant d’auteurs qu’ils n’ont jamais lus, retrouvant les sentiers tracés par d’illustres auteurs qu’ils ignorent, tout candidement.
Une nouvelle fois, Sergio nous a piégés. Car sa tâche consiste à nous surprendre, à se faire aussi discret que possible. Comme un chasseur à l’affût, il avance à petits pas pour ne pas effrayer ses proies, pour ne pas les effaroucher, mais les mener où il le souhaite – dans un « hors-cadre scolaire ».
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